La grande traversée des Alpes (3)

Récit de la troisième saison

reliant

Modane à St-Étienne-de-Tinée

Mercredi 18 août : Pessac - Modane

C’est en possession du précieux « Pass sanitaire » devenu récemment indispensable que nous rejoignons Modane en train, pour poursuivre notre aventure débutée en 2019.
Avant de nous mettre en marche dès le lendemain matin, nous dînons à la Pizzeria que nous avions appréciée l’an dernier.

* Retrouvez ici et ici le  récit des saisons précédentes

Jeudi 19 août : Modane - Vallée étroite

17/31° C

Après une bonne nuit et le petit déjeuner à l’hôtel, il nous reste une formalité avant de quitter la ville : acheter un pain de Modane, brioche locale, garnie de fruits confits dont l’origine remonte à la fin du XIXe siècle mais qui aurait pu disparaître si la famille Noguera n’avait pas conservé la recette traditionnelle depuis les années 30.

Dernier point de vue sur Modane
Valfrejus

Il est 8 h 45 quand nous quittons la ville par une variante du GR 5. Nous prenons rapidement de la hauteur. Nous montons dans la forêt et rejoignons le tracé principal du GR à la station de Valfréjus . Nous poursuivons notre ascension en suivant une piste « militaire ». Tout au long de notre itinérance, nous découvrirons de nombreux ouvrages (blockhaus, batteries, casernes, …) qui nous rappellent la proximité de la frontière italienne. Il est 11 h 15 quand nous nous accordons une première pause, l’occasion de goûter à ce fameux pain de Modane.

Piste militaire et ancienne caserne
Pain de Modane

Deux heures plus tard nous atteignons le col de la vallée étroite (2434 m) qui marque la fin de notre première ascension. C’est ici qu’avant 1947 se situait la frontière franco-italienne, mais aujourd’hui ce col marque la limite entre la Savoie que nous quittons et les Hautes Alpes. Nous descendons dans la Vallée étroite, dont nous avons du mal à comprendre l’origine du nom.

Vallée étroite ? A vous de juger...

Ce soir nous faisons étape en France mais avec une nette sensation d’être encore en Italie. Le personnel du refuge parle presque exclusivement italien, tout comme la majorité des randonneurs. Il faut dire que le lieu rattaché administrativement à Névache depuis 1947, reste accessible par la route uniquement depuis l’Italie.

Les chiffres du jour : 19 km, 1487 m d+, 787 m d-, IBP = 134, durée de l’étape : 7 h 10

Vendredi 20 août : Vallée étroite - Plampinet

18/32° C

Les pointes de Balthazar, Melchior et Gaspard

Nous quittons les granges de la vallée étroite à 9 heures et découvrons la crête des rois mages (I Ré Magi) qui matérialise la frontière.

Vallée de Névache
Les Demoiselles coiffées

Une fois franchi le col de Thures (2194 m) nous entamons une longue descente vers Névache où nous croisons de nouveau des randonneurs francophones. Le paysage est marqué par l’érosion.
La descente se poursuit jusqu’à Plampinet. Nous y faisons étape dans une ancienne caserne qui hébergeait vers le milieu du XIXe siècle des douaniers, puis, à partir de 1890, des soldats spécialistes du milieu alpin. Ce n’est qu’un siècle plus tard, en 1980, que l’actuelle propriétaire en a fait l’auberge de la Cleida (signifiant clé des Acles).

Les chiffres du jour : 12,4 km, 460 m d+, 747 m d-, IBP =76, durée de l’étape : 4 h 10

Samedi 21 août : Plampinet - Briançon

14/32° C

Plampinet, dominé par le fort de l'Olive
Rencontre au chalet des Acles

Ce matin, petit déjeuner dès l’ouverture à 7 h 30, échauffements à 8 h 15 et départ 8 h 30, car le programme est chargé.
En quittant Plampinet dominé par le fort de l’Olive, nous prenons de l’altitude, passons par les chalets des Acles où nous sommes accueillis de pied ferme.

Col de Dormillouse
Montgenevre

 Loin d’être impressionnés, nous poursuivons vers le col de Dormillouse (2445 m) où nous faisons notre première pause à 11 heures.
Après une dernière petite montée pour franchir le col de la Lauze (2530 m), nous entamons notre descente vers le domaine de Montgenèvre puis continuons pour atteindre Briançon.

Le pont d'Asfeld à Briançon

Nous entrons dans la cité Vauban en franchissant le Pont d’Asfeld  avant de longer les remparts pour atteindre notre hôtel à 17 h 30,  à l’issue de cette longue étape.

Les chiffres du jour 27,2 km, 1191 m d+, 1485 m d-, IBP = 143, durée de l’étape : 8 h 55

Dimanche 22 août : Briançon - La Chalp

18/27° C

Chalets des Ayes
Col des Ayes

Après la longue étape de la veille nous quittons Briançon et ses fortifications à 8 h 20, pour reprendre de l’altitude.
Deux heures plus tard nous arrivons au Chalets des Ayes.
Après une première pause, nous reprenons notre progression vers le col des Ayes (2477 m) qui marque le passage entre Briançonnais et Queyras.
En quittant le col, nous nous engageons dans une descente vers Brunissard, passant à proximité du pré Premier.

Arrivée sur La Chalp

A 1 km de notre objectif du jour, nous décidons de quitter le GR 5 qui emprunte la route et de suivre un itinéraire alternatif en balcon qui nous offre une approche plus aérienne et une vue dégagée sur la Chalp.

Les chiffres du jour21 km, 1326 m d+,  864 m d-, IBP = 128, durée de l’étape : 7 h

Lundi 23 août : La Chalp - Ceillac

10/28° C

Lac de Roue
Fort Quyras en surplomb de
Fort Queyras en surplomb de Château-Queyras

Aujourd’hui, le profil de l’étape du jour est moins classique. Après 5 km de faible dénivelé, nous descendons rapidement, passant au bord du Lac de Roue, pour arriver à Château-Queyras (1350 m) sur lequel veille le Fort Queyras.

Pause avant le col Fromage
Cairns insolites

 Après une pause au pied du fort, nous nous lançons sur 6 km à une pente moyenne de 15 %, soit 900 m de d+ parcourus en moins de 2 heures.
Rassurés sur notre capacité à maintenir ce rythme demain si la météo nous l’impose, nous nous accordons une nouvelle pause sur un plateau entouré de sommets avant de franchir le col Fromage (2301 m) et de redescendre vers Ceillac en suivant une route jalonnée de cairns insolites.

Les chiffres du jour  21,8 km, 1344 m d+,  1369m d-, IBP = 144, durée de l’étape : 7 h 15

Mardi 24 août : Ceillac - Maljasset

13/22°C

Ceillac
Chemin des contes et légendes

La météo annonce un risque d’orage en début d’après-midi. Nous devons avoir franchi le col Girardin, avant midi pour ne pas prendre de risque.
Nous quittons donc Ceillac à 8 heures précises et empruntons un chemin en pente douce balisé par d’étranges personnages.

Lac-miroir des prés Soubeyran
Lac Sainte-Anne

2,5 km plus loin la pente se fait plus raide et 500 m plus haut nous découvrons le Lac des prés Soubeyrand appelé aussi à juste titre lac miroir.
Nous le dépassons pour atteindre à 10 h 25 le Lac Sainte-Anne (2415 m). Le col n’est plus qu’à 2 km (300 m de d+) et le ciel n’est pas encore trop inquiétant. Nous pouvons donc nous accorder une petite pause .
Reprenant notre progression un peu avant 11 heures, nous franchissons le col Girardin (2700 m) 40 minutes plus tard et entamons immédiatement notre descente avant d’entendre au loin quelques coups de tonnerre. Est-ce ainsi qu’on accueille les randonneurs qui quittent les Hautes-Alpes pour entrer dans les Alpes-de-Haute-Provence ?

Arrivée sur Maljasset

A mi-chemin, nous quittons le GR 5 pour rejoindre Maljasset que nous apercevons 400 m plus bas.
Finalement à 30 minutes du but la pluie commence à tomber, mais ne deviendra plus intense qu’après notre arrivée.
Les sommets alentours sont saupoudrés de neige.
Avec une motivation particulière nous avons bouclé l’étape annoncée à 6 h 35 de marche en 4 h 45 pauses comprises nous préservant ainsi des caprices du ciel.

Les chiffres du jour13,5 km, 1119 m d+,  874 m d-, IBP =119, durée de l’étape : 4 h 45

Mercredi 25 août : Maljasset - Fouillouse

14/20° C

Ce matin le ciel est dégagé, l’étape du jour est la plus courte du séjour, et la pluie n’est pas annoncée avant le milieu d’après-midi.
Nous quittons donc à plus de 8 h 30 Maljasset sereinement et descendons en suivant l’Ubaye tantôt sur le bord de la route, tantôt sur les sentiers.

Saint-Antoine
L'Ubaye depuis le pont du Chatelet

Nous traversons les hameaux de la Barge et Saint-Antoine avant de faire une pause en vue de l’impressionnant pont du Chatelet (composé d’une arche unique, il franchit l’Ubaye 97 m plus bas).
Après l’avoir vu d’en bas, nous le traversons et poursuivons jusqu’à Fouillouse, où nous faisons étape.
Il est 12 h 30  quand nous arrivons devant le gîte fermé jusqu’à 16 heures.
Heureusement que les propriétaires de l’épicerie du hameau ont un sens de l’accueil plus développé et nous permettent de patienter en terrasse moyennant café et tarte aux myrtilles jusqu’à l’arrivée de la pluie.

Les chiffres du jour : 11,5 km, 416 m d+,  445 m d-, IBP =66, durée de l’étape : 3 h 50

Jeudi 26 août : Fouillouse - Larche

14/29° C

Après le petit déjeuner pris dans une ambiance aussi froide que l’accueil de la veille, nous quittons sans regret le gîte des Granges de Fouillouse sous un ciel redevenu bleu.

Échange franco-suisse au col du Vallonet
Baraquements de Viraysse

Nous longeons les ruines du fort de Plate Lombardes au cours de notre montée vers le col du Vallonet (2524 m) où nous décidons d’aller voir le lac du Vallonet supérieur avant de revenir sur le GR et descendre faire une pause à proximité du lac inférieur qui lui est à sec.
Nous poursuivons notre étape en remontant vers le col de Mallemort (2558 m), en passant à proximité des baraquements de Viraysse  et finissons notre journée par 4 km de descente à plus de 20 % de pente moyenne pour atteindre Larche en fond de vallée.

Le village de Larche

L’accueil chaleureux au gîte contraste avec celui de la veille. Après s’être installés, nous visitons ce petit village détruit par les Allemands en 1944 et entièrement reconstruit

Les chiffres du jour13,8  km, 834 m d+,  1049 m d-, IBP = 108, durée de l’étape : 5 h 35

Vendredi 27 août : Larche - Bousiéyas

8/30° C

A 8 heures quand nous commençons notre journée de marche, il fait plutôt frais en fond de vallée. Bien que nous devions grimper de 1000 m, la pente de la première partie, longeant l’Ubayette, ne suffit pas à nous réchauffer.

Le lac Lauzanier
Le lac de derrière la Croix

8 km plus loin, là où les promeneurs laissent leur voiture pour accéder au Lac du Lauzanier, notre vœu est exaucé. Le soleil et la pente désormais plus raide nous réchauffent et nous atteignons le lac à temps pour notre première pause de la journée.
Nous avons le plaisir d’assister aux jeux de deux marmottons insouciants de notre présence. En poursuivant notre ascension la fréquentation du sentier diminue, l’environnement est plus minéral.

Nous contournons le lac de derrière la Croix  et atteignons le pas de la Cavale (2671 m) où nous retrouvons Sébastien qui nous souhaite la bienvenue « chez lui, dans le Mercantour ». Nous entrons alors dans les Alpes Maritimes.
Après une délicate descente qui nous conduit 500 m plus bas, nous nous accordons une seconde pause.

Si nous identifions bien le chemin que nous devons prendre pour atteindre le col des Fourches, nous avons beaucoup plus de mal à imaginer le chemin d’où nous venons.

Le camp de Fourches
No comment...

Le col franchi, nous découvrons le camp de Fourches, traversé par la route du col de la Bonette-Restefond.
Cette route touristique suit le tracé de la première piste militaire. L’armée s’est d’ailleurs opposée à sa création jusqu’au report de la frontière franco-italienne sur la ligne de crête du Mercantour suite au traité de 1947.
A sa création à l’été 1950, en reliant Nice à Barcelonnette par Saint-Etienne-de-Tinée et Jausier, elle devient la 3e parmi les plus hautes routes d’Europe (passage au col de Restefond à 2690 m).
10 ans plus tard moyennant une extension de 6 km qui franchit le col de la Bonette à 2860 m elle devient la première plus haute route d’Europe.
Après ce passage historique nous poursuivons notre descente vers le hameau de Bousieyas. Nous traversons prudemment la route où se croisent cyclistes et motards qui sont également invités à rester prudents.

Les chiffres du jour : 20,2 km, 1254 m d+,  1044 m d-, IBP = 135, durée de l’étape : 7 h 20

Samedi 28 août : Bousiéyas - St-Étienne-de-Tinée, Nice

14/30° C

Si la météo est favorable, nous ne devons pas traîner ce matin, car l’étape s’annonce éprouvante en raison des deux grosses descentes à négocier avec une entorse à la cheville et la nécessité d’arriver à temps pour prendre notre bus pour Nice.

Col de la Colombière
Saint-Dalmas-le-Selvage

A 2 km du départ nous croisons deux randonneuses qui rebroussent chemin après s’être heurtées à deux chiens de troupeau apparemment agressifs.
Nous décidons de poursuivre notre progression mais en contournant la zone indiquée et retrouvons le GR après la cabane de berger. Nous passons sans encombre le col de la Colombière et entamons la première descente vers Saint-Dalmas-le-Selvage .

Descente dans la vallée de la Tinée
Objectif atteint

3 km plus loin nous franchissons notre dernier col, le Col d’Anelle et débutons notre descente dans la vallée de la Tinée.
Après une dernière pause nous arrivons à destination avec 2 heures d’avance sur notre bus.
La route qui nous conduit à Nice est encore jalonnée des traces laissées par la tempête Alex qui a touché la région en octobre 2020.

Les chiffres du jour : 17 km, 686 m d+,  1428 m d-, IBP = 102, durée de l’étape : 6 h 00

Dimanche 29 août : Nice - Pessac

Après un dîner au restaurant et une nuit à l’hôtel, chacun rejoint Pessac par avion.

CES 10 jours de randonnée sur 4 départements différents ont permis de faire la transition entre les Alpes du Nord, humides et forestières, et les Alpes du Sud, tourmentées et variées, où on perçoit déjà l’ambiance méridionale.
Les nombreux cadrans solaires présents dans le Briançonnais, le Queyras l’Ubaye et le Mercantour en sont une illustration.

Ce fut également l’occasion d’échanges enrichissants avec d’autres randonneurs rencontrés sur plusieurs étapes, notamment Dominique, le Zurichois, tout fraichement retraité, parti de Saint-Gingolph le 24 juillet et prévoyant d’arriver à Menton le 10 septembre, ou Sébastien parti comme nous de Modane et qui saisissait chaque opportunité pour gravir un sommet (en chaussures minimalistes) ou se baigner dans les lacs d’altitude et qui a su nous donner envie de traverser un jour le Mercantour, mais aussi Aurore, Michel…

L’été 2021 s’achève mais déjà 2022 se prépare avec la fin des traversées pyrénéenne en juillet et alpine en août, chacune rejoignant la Méditerranée.